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Une fatigue empoisonnante

Publié par Gilles Goetghebuer, journaliste santé le 28/06/2005 - 00h00
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Les épreuves d'endurance donnent parfois lieu à des situations inquiétantes de fatigue extrême qui présentent alors tous les symptômes d'un véritable empoisonnement !

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Les défaillances dans les épreuves d'endurance portent rarement à conséquence. Les secouristes allongent l'athlète, le réhydratent, lui donnent éventuellement un peu d'oxygène. Et tout rentre dans l'ordre. Plus rarement, la situation se complique. La détresse gagne le système cardiorespiratoire et peut même provoquer un blocage rénal. Chaque année, on recense une poignée de décès parmi les participants d'épreuves de longue durée : raids, marathon, triathlon, etc. Ce n'est pas beaucoup à l'échelle des millions de personnes qui participent à ce genre de compétitions dans le monde. Mais la cause précise de ces décès est longtemps demeurée une énigme pour le monde médical. Aujourd'hui, les médecins incriminent une classe particulière de substances : les endotoxines.

Sur la route des endotoxines

Si le terme endotoxines est vaguement familier, peu de gens savent exactement de quoi il retourne. En réalité, il s'agit d'une classe de molécules complexes présentes dans l'intestin et qui profitent de la désorganisation des muqueuses intestinales pour passer dans la circulation. A l'état de repos, ces endotoxines ne représentent guère de danger. A l'effort, par contre, elles risquent d'envahir l'organisme. On le constate lors de dosages biologiques sur les participants de compétitions au long cours. Un grand pourcentage de ceux qui se trouvent en état d'épuisement avancé présente un taux d'endotoxines nettement supérieur à la norme (0,1 ng/ml de sang).D'où vient cette vulnérabilité? Médecins et physiologistes supposent que le tube digestif supporterait mal les situations prolongées de privation sanguine. Or, lorsqu'on fait du sport, la circulation dans les viscères chute sévèrement jusqu'à descendre au cinquième de sa valeur habituelle. En cas de fortes chaleurs, c'est encore pire. Le sang est mobilisé vers les muscles et vers la peau et il ne reste presque plus rien pour irriguer les intestins. L'organisme réagit alors en privilégiant les destinations les plus gourmandes. Et tant pis pour les cellules intestinales de moins en moins imperméables.

Et le tube digestif devint passoire

Ce phénomène de désertification sanguine du tube digestif explique que l'on déconseille de faire du sport moins de trois heures après avoir mangé. On s'évitera de subir ainsi les désagréments d'un blocage de la digestion en cours de processus. Mais on s'est aussi apercu que, même avec l'estomac vide, la situation peut rapidement se compliquer. Sous l'influence d'enzymes comme l'élastase du pancréas ou la pepsine présente dans le suc digestif, les cellules de la paroi se dégradent et laissent des trous dans le système de défense, ce dont profitent les endotoxines pour s'échapper. Petit à petit, les intestins se comportent en passoire et s'avèrent bien incapables de contenir le moindre poison. Si les reins sont touchés, la situation peut même devenir grave. La présence d'endotoxines facilite à son tour une coagulation du sang et la libération de toute une série d'autres facteurs opportunistes.

L'ensemble des organes se retrouve alors en situation de siège. On note un net ralentissement de la néoglucogenèse, processus qui permet normalement à l'organisme de pallier le manque de glucose. Certains globules blancs, dits neutrophiles, en profitent pour s'immiscer au niveau pulmonaire et provoquer une détresse respiratoire. Le cŒur se trouve également victime de ce déferlement sauvage. Bref, l'organisme n'en mène pas large. Heureusement, cela ne dure pas. Il suffit de deux heures de repos pour que le taux sanguin d'endotoxines redescende sans séquelle à des valeurs plus normales. L'erreur consiste en somme à ne tenir aucun compte de ces signaux d'alerte. Rien ne sert de poursuivre un effort… au-delà de son propre épuisement!

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Publié par Gilles Goetghebuer, journaliste santé le 28/06/2005 - 00h00
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